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Inferno triathlon

Retour de l’enfer

Bon, comme promis, voici un petit compte rendu de notre séjour suisse. Tout a commencé jeudi matin où nous avons pris, avec Patrick, la voiture direction Lauterbrunnen.

Non en fait non. Tout a commencé il y a plusieurs mois de ça. Octobre dernier. Je suis en plein dans la diagonale. Je me suis inscrit à Lanzarote deux mois auparavant et je suis de retour de Zofingen. Bref, question compétitions ça va. Pourtant je viens de recevoir le dernier Triathlète. Dedans, un article de Romuald Lepers sur un triathlon atypique en Suisse. L’Inferno triathlon. Particularités : une épreuve VTT en plus du vélo habituel et un sacré dénivelé. Une épreuve qui semble hors normes. Tout pour me plaire.

Au retour de la Réunion l’idée fait son chemin. J’en parle autour de moi. Les barrières horaires font peur, le VTT aussi. Les vidéos de la descente VTT, filmées par un concurrent, découragent. Moi ça me stimule. Je relance et relance encore, sans succès. Début février les inscriptions sont ouvertes. Je m’inscris, seul. Tant pis pour les autres, moi j’y vais !

C’est à peu près à la même période que je croise Patrick à la piscine de Cassis. On se connaît depuis des années. C’est un ancien de l’ASPTT et un traileur avec qui j’ai partagé un temps le même kiné. On nage ensemble une fois, puis deux, puis régulièrement. On habite à côté l’un de l’autre et finalement, vu les difficultés pour moi à m’entraîner avec le TCM et les Rebelles, je m’entraîne de plus en plus avec lui. Et fatalement je lui parle de l’Inferno. Je le lui vends bien et il se sentirait de le faire l’année prochaine. En en discutant je le convaincs de le faire ensemble cette année, de partager ainsi les frais et l’expérience. Des places se libèrent à ce moment et une liste d’attente est mise en place par l’organisation. Il en est et début juillet c’est officiel, nous serons tous les deux au départ.

Départ de Marseille jeudi, donc. Passage chez Massilia Bike System pour une réparation de dernière minute. Mon petit pignon a cassé (c’est le deuxième en 2 mois) et il me sera difficile de faire 97 km avec une cassette qui menace de rompre à tout moment. Pignon changé, c’est parti ! Le trajet, les « zofinguiens » le connaissent bien. Chambéry, Genève, Lausanne, Fribourg et là on tourne à droite. Berne puis Thun, puis Interlaken et enfin Lauterbrunnen. Un simple village coincé entre deux parois rocheuses d’où des fous se jettent en base jump version Wing suit.

http://www.dailymotion.com/video/xb4kiv_base-lauterbrunnen_sport

http://www.dailymotion.com/video/xnr6ri_basejump-wingsuit_sport?search_algo=1

Un torrent au milieu et des glaciers en toile de fond. Magnifique ! On plante la tente, on mange et surtout on dort !

Vendredi préparation des sacs. Quatre épreuves au lieu de trois ça veut dire une transition de plus, donc un sac de plus. Sans compter que l’on peut laisser un sac à Mürren, un village que l’on traverse au 17è km de course à pied et que des affaires peuvent nous attendre à l’arrivée, au Schilthorn. Ca fait donc pas mal de préparation. On y passe toute la matinée. Puis il faut poser tout le matériel. Le vélo de route d’abord, avec le sac rouge. Puis le VTT avec son sac jaune, puis les affaires pour la course à pied à 5 km du camping (sac bleu). C’est ici à Stechelberg que nous prenons le téléphérique pour rejoindre Mürren et suivre le briefing en allemand (autant vous dire, l’humour dans la langue de Goethe, ça passe pas. Tout le monde rit, on reste de marbre). On laisse nos deux derniers sacs et on participe à la pasta party. Puis redescente, camping et dodo… jusqu’à 4h00.

Samedi c’est le grand jour. Un café pour moi, un thé pour Patrick et nous rejoignons Stechelberg où un car nous amène au départ à Thun. Boisson d’attente, enfilage de la combi, vaseline, échauffement à sec, la routine quoi.

 L’Inferno vous connaissez ? Non ? Voici quelques renseignements en image :

Inferno Triathlon - Virtuelle Streckenführung / Virtual Routing - YouTube

Et le profil de la course :

En fait il s’agit de 3.1 km de natation, de 97 km de vélo de route, de 30 km de VTT et de 25km de course à pied. 155 km avec plus de 5500m de dénivelé, autant qu’à Embrun !

On part d’un lac que l’on traverse à la nage puis on grimpe sur les hauteurs, on redescend pour longer l’eau avant d’attaquer le premier col de la journée, le grosse Scheidegg. Dans la montée on passe à côté des chutes de Reichenbach. Ça vous parle ? C’est pourtant là que Sherlock Holmes meurt, poussé par Moriarty. Si, si, souvenez-vous, vous l’avez sûrement lu ado. Non ? Descente sur Grindelwald, petite station de ski, transition route-VTT et c’est reparti pour le deuxième col du jour, le Kleine Scheidegg. Descente à nouveau vers Lauterbrunnen et le fond de la vallée, Stechelberg. Transition VTT-course à pied et c’est parti pour 25 km dont les 20 derniers en montée. On finit au sommet du Schilthorn là où a été tourné un James Bond (Au service secret de Sa Majesté). Si, si vous avez dû le voir. Celui avec un acteur qui n’aura fait qu’un épisode, celui dans lequel joue Kojak et Emma Peel. Non ?

On traverse des coins splendides, des stations de ski, parfois sans route d’accès comme à Mürren, juste ravitaillées par train à crémaillère et téléphérique ; on longe deux lacs qui n’ont rien à envier à Serre Ponçon ; on a en point de mire des glaciers immenses et majestueux. Et surtout, on va d’un point A à un point B, sans jamais revenir sur ses pas. Une longue promenade-découverte en fait.

Autre point sympa, il peut se faire seul ou en team trophy, course à quatre, chacun faisant une discipline (avec une course à pied raccourcie qui s’arrête à Mürren). Il y a même un semi-marathon qui reprend les 21 derniers km de notre course à pied.

 

La natation.

L’Inferno c’est tout d’abord 3.1 km de natation en lac. Une traversée de lac entre deux villes, Thun et Oberhofen. Une eau à 21° pour un air à 16°. Une eau douce. Le soleil qui illumine l’horizon montagneux. Le château éclairé d’Oberhofen comme amer. 300 triathlètes au départ. Des ballons qui soulèvent la ligne de départ puis qui s’envolent.

On s’encourage avec Patrick. On est tendu devant la tâche que l’on s’est fixé. C’est parti. Il est 6h30’00 à ma montre. C’est beau l’exactitude suisse quand même.

Ca nage cool. On a assez de place pour prendre nos aises sans se bousculer ni se taper dessus. Ça change des Ironman. A un moment Patrick me verra nager à côté de lui. C’est dire si c’est cool.

A chaque coup d’œil le paysage est splendide. On nage au pied des montagnes, avec des glaciers au fond. C’est ça la Suisse que j’attendais à Zofingen. Et là je l’ai.

54’37. Je sors de l’eau. Tout s’est bien passé. J’ai nagé un max sur les bras, ne mettant les jambes que pour rattraper un groupe ou en lâcher un autre. Je suis frais, dans tous les sens du terme, fait pas chaud quand même.

  Le vélo.

Pour avoir un aperçu du parcours :

http://vimeo.com/14578127

Transition éclaire et me voici parti sur mon premier destrier. Après environ 400m au bord du lac on tourne à gauche et là ça monte. Mais quand je dis ça monte, ça monte. On prend 600m en 18km, sans parler des descentes qui, inévitablement, font encore grimper le D+. A chaque mur je me dis que Patrick va me détester. Puis descente sur Interlaken. 80.5 km/h. Yaouh !

Plat en bord de lac, là encore c’est magnifique. Mais pas trop le temps d’en profiter, c’est le prolongateur, la plaque et on lâche rien. Au 65è débute la dernière ascension en route : le Grosse Scheidegg. Sur les forums on parlait d’un Ventoux. Erreur. C’est un mélange de Pallon et des Crêtes sur 19km. 1300m de D+, sans D-. Très dur. Mais très beau, avec un glacier que l’on longe sur les derniers kms. De toute beauté.

Puis à peine le col franchi c’est la descente sur Grindelwald et le parc VTT. Elle est vertigineuse cette descente. Etroite. Si étroite que lorsque les cars et autres véhicules montent, ils sont précédés d’une moto avec un sifflet pour prévenir de s’écarter, puisqu’il est impossible de les croiser, même avec nos petits vélos. C’est ce qui m’arrivera lorsqu’un engin agricole rejoindra un champ plus haut. Autant vous dire que ça calme. Et pas qu’étroite. Sinueuse aussi. Et très pentue. Si un jour vous la descendez, vous trouverez peut être mes freins, quelque part. Ils n’ont pas arrêté de couiner, alors que j’étais obligé de freiner même en fin de virage ! 12 km pour perdre plus de 900m de D-. Obligé de compenser en mâchant pour éviter d’avoir mal aux oreilles (non, non, je ne suis pas Marseillais). Puis c’est l’arrivée à Grindelwald. Temps vélo 4h15 pour 97km et 2145m de D+.

 

Le VTT.

Je laisse mon course, enfile mon camelback, change de chaussures et pars en VTT. C’est plat le VTT. Sur 200m environ. Et puis ça monte. Mais quand je dis ça monte, ça monte. 1100m sur 11km. Une route d’abord puis une DFCI. Je prends ma première cartouche. Obligé de pousser en prenant un gel. Plus de jus. Faut dire qu’il est très dur d’enchaîner route et VTT. On ne sait pas sur quel braquet se mettre. Donc soit je mouline soit je force. Pénible.

A chaque fontaine (et elles sont nombreuses) c’est la même nuée de vététistes qui se ruent pour se tremper et boire du frais. On finit par une piste de ski. L’hiver c’est sympa à dévaler une piste de ski. L’été c’est moins sympa à monter en VTT sous 30°. Donc on pousse tous nos vélos. Au sommet on trouve une station de ski ravitaillée par un train à crémaillère. Nous sommes au Kleine Scheidegg (2060m).

Puis c’est enfin la descente. Depuis que j’ai vu les vidéos sur internet je me languis ce moment. Je suis curieux de savoir si je serai capable de descendre comme le gars.

Inferno Triathlon 2010: MTB Kleine Scheidegg to Lauterbrunnen - part I - YouTube

Inferno Triathlon 2010: MTB Kleine Scheidegg to Lauterbrunnen - part II - YouTube

C’est parti ! Au début j’ai du mal. Il y a des travaux, ça dérape pas mal et surtout je manque un peu de lucidité. Puis ça revient. A chaque fois que je freine, je me pose la même question : est-ce que j’ai besoin de freiner ? Non ? Alors je lâche tout et je relance.

Puis c’est la partie plus étroite. J’ai pas mal doublé déjà et je ne vais pas m’arrêter là. Je range mes lunettes dans mon camelback, je me refais doubler puis je m’élance pour MON moment. C’est plus facile que ce à quoi je m’attendais. Je double, redouble et double encore. Les épingles se suivent, je relance, dérape et relance encore. Je prends un pied fou. C’est vite, trop vite la fin. Par contre si vous y passez, il doit y avoir des freins ici aussi, ainsi que mes doigts, crispés sur les manettes. Au final je mets moins de 3’ de différence par rapport au gars de la vidéo. C’est beaucoup oui mais :

  • 1 : y’avait des travaux en haut qui m’ont retardé
  • 2 : entre les deux vidéos il manque un bout, il met donc plus de temps que ce que j’ai chronométré
  • 3 : et surtout le gars courait le team trophy. Il ne faisait donc QUE le VTT.

Bref je suis content de mon temps. Je file sur les 5 derniers km de route entre Lauterbrunnen et Stechelberg où se trouve le parc course à pied. Au final : 2h25 pour 30km et 1180m de D+.

 

La course à pied.

Transition éclaire. Le temps d’enfiler chaussettes et chaussures, casquette sur la tête et ça repart. On redescend tout d’abord à Lauterbrunnen d’où l’on vient. 5 km de légère descente. Mon objectif est d’y courir, pour emmagasiner de l’avance en vue de la suite. La suite justement c’est après le 5è km. Ca monte. Mais quand je dis ça monte, ça monte. On prend 2175m de D+ sur 20km. Et là grande solitude. Je pensais marcher mais je me fais doubler par tout le monde. Ils courent ! J’essaie de suivre mais la réalité se rappelle à moi. J’en suis incapable. Trop mal aux jambes, trop de pulsations cardiaques. Malgré tout je suis capable de relancer dès que je peux. Je vois bien quelqu’un marcher mais c’est une fille. Je vais pas me laisser faire quand même, d’autant qu’elle marche plus vite que moi ! Je sais que j’aurai un replat au 13è. Il faut tenir. Je tiens. C’est à peu près plat jusqu’au 17è et l’arrivée à Mürren. J’arrive à courir, parfois plus d’un km d’affilée. Un exploit pour mes petites jambes si fatiguées.

A Mürren, station Suisse aux chalets tout droit sortis d’Heidi, c’est les habituels encouragements, les hop, hop, hop germaniques. J’y récupère mon camelback (le 2è de la journée) et je me lance à l’assaut des 8 derniers kms. Je sais qu’ils seront pentus et durs. Pour ça, ils le seront. Je prends ma 2è cartouche de la journée à la sortie du village. Ce kilomètre là sera difficile. Il monte et monte encore. Impossible ne serait-ce que de trotter. En face de nous une piste de ski. Au moins une rouge, sans doute une noire. Et des coureurs dessus. Il va falloir monter là haut ??? Au ravito, je tombe sur de la charcuterie et du pain. Je me refais la cerise et commence à reprendre du poil de la bête. Je double quelques concurrents.

Commence la lente ascension. A chaque crête que l’on passe, une nouvelle à atteindre, encore plus haute. La végétation se fait plus rare puis disparaît. Je me fixe sur le concurrent devant moi, en point de mire et je tente de le rattraper. Je m’en fais pas mal comme ça. Et à chaque fois que je peux je trotte (vue l’allure, je ne peux pas dire que je cours).

Puis arrive le dernier km. Sur le profil on voit bien que ça monte. Quand on y est on s’en rend vraiment compte. Plus de 200m de D+ sur un seul km ! Et là, 3è cartouche. Je suis sec. Je me fais doubler par une pin-up toute guillerette, à 300m du but (10’ les 300m quand même). Je lutte contre un allemand que j’avais doublé peu de temps auparavant. La pin-up passe encore, on est galant après tout, mais le teuton il restera derrière ! Je finis devant lui en 12h13’09. Sur la course à pied 4h37. Plus de 35’ pour le dernier kilomètre.

Une vidéo de ces derniers mètres :

http://www.youtube.com/watch?v=UThJXfy8PsY

Et de l’half marathon dont le départ est donné de notre camping et qui reprend les 21 derniers kms de notre parcours :

21.08.10 Inferno Halbmarathon 2010 - YouTube

J’ai fini, j’ai vaincu l’enfer. Je suis au paradis, sur le toit du monde ou du moins au sommet de la montagne. La vue est encore une fois magnifique, à 360°. Je vois au loin le lac d’où je viens. Qu’il semble petit et lointain. Je vois également le Grosse et le Kleine Scheidegg. Bref tous ces endroits, cols et pistes par lesquels je suis passé.

Et Patrick me direz-vous ? De niveau proche en natation, nous sortons quasi en même temps tous les deux. Il prend plus de temps pour se changer et enfourche donc son vélo peu après moi. La route n’est pas forcement sa tasse de thé. Il y perd pas mal de temps mais surtout pas mal de jus. La montée VTT lui sera d’autant plus pénible, alors que je pensais qu’il ferait un meilleur temps que moi sur cette partie. Il part en course à pied avec un sérieux handicap. Il remplit néanmoins l’objectif que l’on s’était fixé de courir sur les 5 kms plats. Puis il connaît la même galère lors de la montée, avec le souci supplémentaire de l’heure qui tourne. Il termine dernier concurrent à Mürren, ovationné comme aucun d’entre nous, après 12h48 de course. Il ne lui restait que 8 kms à parcourir. Ça semble peu mais j’ai mis 2h40 à les faire ces 8 kms. C’est toute la démesure de cette course hors normes. Pour autant, bien que je le sente déçu, il ne parle que d’y retourner. C’est devenu son point de mire, SON OBJECTIF : finir l’Inferno. Et je n’ai pas de doute il y arrivera.

Dernière minute : Ça y est ! 2017 est la bonne année. Il l'a fait. Il est cassé de partout, crevé mais heureux. Patou est finisher de ce triathlon hors norme. Bravo à lui.

Voilà. Résumé en quelques lignes, c’est notre course. Elle est vraiment à faire. Exigeante mais magnifique. Dure mais jouissive. Hors normes sûrement mais si belle. Une organisation parfaite, des paysages à couper le souffle. Un parcours sans boucles multiples mais avec un vrai début et une fin grandiose.

Plus j’y repense plus j’ai envie d’y retourner un jour. Peut-être refaire la course. Peut-être pas. Mais une partie de mon cœur est restée dans ces vallées encaissées, encadrées de glaciers.

   Nico.

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