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Ötillö 2017

suite et fin (provisoire) des aventures des Renards du Désert dans le monde du swimrun. 

 

 06/12/2016. Guy et moi avons gagné nos premiers points au Swimrun Ranking grâce à nos courses de l’Engadin et du Rockman l’été dernier. Je viens d’inscrire les Renards du Désert à la loterie pour participer à l’Ötillö 2017.

 

Dans notre esprit ce n’est que la première des fastidieuses étapes qui nous amèneront, d’ici plusieurs années, en Suède. Ne m’a-t-il pas fallu trois longues saisons de compétitions qualificatives, de tirages au sort infructueux pour, enfin, être pris à l’UTMB ? Ne m’a-t-il pas fallu deux ans pour pouvoir participer au Norseman ? C’est hélas devenu une certaine norme : il est plus difficile de s’inscrire que de réaliser certaines courses.

 

30/01/2017 19h03. Je sens mon portable qui vibre dans ma poche. Un mail. Je suis auprès d’un patient et, lorsque je sors quelques minutes plus tard, je prends le temps de le lire. Juste un mail automatique. Quelques lignes en Anglais qui nous demandent de payer d’ici deux semaines pour pouvoir participer à Ötillö. Je le relis deux fois pour bien être sûr de ce qui est écrit. Oui, c’est bien ça, nous sommes pris à Ötillö !

 

Lorsque l’on relit ce mail, on est partagé entre ce qu’il représente, la participation à la finale de Championnat du Monde de Swimrun, à l’épreuve originelle et le caractère « cheap » de cette annonce, sans logo, réalisé de manière automatique, où avant toute chose on vous demande de payer.

 

Un coup de fil à Guy et nous rigolons comme des bossus. Nous sommes pris. Nous y allons ! Aucune hésitation de part et d’autre, malgré un programme déjà chargé. Nous serons à Stockholm en septembre !

 

Pour moi, ça veut dire enchaîner deux épreuves monstrueuses, autant dans ce qu’elles proposent, que dans ce qu’elles représentent, en moins d’un mois d’intervalle. Je sais que le doublé Norseman-Ötillö va être très dur. Mais bon Dieu, on va la faire celle-là !

 

Le Swimrun Côte Vermeille nous permet de nous tester sur une distance plus longue que ce que nous avions déjà fait. Le résultat est satisfaisant. Nous choisissons de changer notre longe pour une plus fine et plus longue. Pour le reste, notre matériel est validé.

 

L’été se passe avec nos objectifs et voyages réciproques. Nous restons en contact pour affiner notre participation. La semaine précédant la course, nous nous retrouvons sur notre plage « d’entraînement » à mi-distance pour chacun d’entre nous. Au programme, test de notre nouvelle longe, reprise de nos automatismes, et surtout choix de partir en combinaison courte ou longue.

 

En effet, les prévisions météos ne sont pas réjouissantes et nous imaginons sans problème que les conditions seront bien différentes de la Côte Vermeille au mois de juin. L’idéal serait d’avoir une combi courte et une longue, pour pouvoir choisir au dernier moment. Pour Guy, pas de problème. Il a toujours sa longue et il a la courte qu’il avait achetée en début d’été. Pour moi, j’avais une longue, que j’ai coupée et qui est maintenant courte. Je teste donc l’ajout des parties coupées mais le résultat n’est pas vraiment probant. Il me faut une longue !

 

Heureusement il y a mon magasin favori : Rando Running Marseille, où Alexandre me fait la grande amitié de me prêter sa propre combi, à peine plus petite que la mienne. Je l’essaye, elle me va. Je pars donc l’esprit tranquille. Quelle que soit la météo, j’aurai la combinaison adéquate.

 

Physiquement, ce n’est pas la forme d’un côté, comme de l’autre. Guy a une inflammation au niveau de l’aine qui le gêne pour courir. Je suis épuisé par le Norseman. Mais il faudra bien que ça aille, donc on y va !

 

Samedi 2 septembre, c’est le départ, direction Nice, où nous prenons l’avion pour Stockholm. Un vol sans encombre. Plus tard, nous récupérons les bagages en compagnie de Cédric Fleureton et du responsable swimrun à la FF Tri. Nous discutons quelques minutes avec eux avant de rejoindre le centre-ville. Un petit périple pour gérer l’hôtel, un repas et un gros dodo pour achever la journée.

 

Le lendemain midi, après avoir un peu flâné dans la ville, nous rejoignons le quai où sont amarrés les ferrys qui vont nous amener sur Sandhamn, l’île d’où nous prendrons le départ, demain matin. Et là, l’atmosphère change. Des T-shirts finishers de partout. Des gars affutés. De la microfibre en veux-tu en voilà. Au mat des ferrys flottent les drapeaux Ötillö. On y est !

 

On retrouve quelques Français dont les stars, Cédric et David Hauss, qui vont participer sous les couleurs de l’Équipe France. Ils sont suivis par une équipe de France Télévision en vue d’un reportage sur eux et sur Ötillö. On rencontre également Nicolas Remires, « le » Français du swimrun, très abordable et sympathique.

 

Quelques semaines avant notre départ, nous avions été contactés par la fédé pour nous proposer de porter un sweat shirt aux couleurs de la FF Tri, pour l’occasion. C’était sans doute un moyen de rendre lisible la gestion du swimrun en France par la fédé de triathlon. Durant le trajet en ferry nous recevons ce fameux blouson blanc estampillé FF Tri et Ötillö 2017. Pour autant nous devons bien reconnaître que nous sommes amers. Tout d’abord les derniers « repêchés » n’en ont pas, pour cause de délai trop court. C’est dommage, ça empêche une unité de tenue. Et surtout, aucune photo de groupe n’a été prise. Aucune communication non plus lors des newsletters de la FF Tri. Merci pour cette polaire, que nous avons portée durant tout le séjour et que je continuerai à porter, mais on sent un amateurisme dans la démarche.

 

Pourquoi la fédé a-t-elle envoyé un représentant ? Pour driver les Français ? Non. Pour représenter la fédé lors du reportage de Stade 2 ? Il n’en a pas été question à un seul moment dans l’émission. Pour faire des photos, pour encourager durant la course, pour encadrer ? Non. Pour apprendre des participants en vue de mieux gérer l’activité dans le futur ? Non encore une fois.

 

À quoi cela a-t-il servi au final ? À aucun moment nous nous sommes senti un groupe France. C’est grâce à un site privé, Swimrun France, nous savions combien d’équipes françaises étaient engagées, combien et qui nous étions. Avec les polaires nous arrivions à nous reconnaître parmi les autres mais il n’y avait pas d’unité, de rassemblement, de gestion de quoi que ce soit. Dommage…

 

Mais fermons la parenthèse fédé. C’est maintenant l’accostage à Sandhamn. Et l’accueil par Matt et Michael, toujours un moment sympathique. Nous sommes dans un complexe touristique composé d’un hôtel et de bungalows en bord de plage, à côté d’un petit village typique de pêcheurs. L’île ne doit être bien grande, un petit bout de terre et de sable planté de pins et autres arbustes. Le temps est, au mieux, maussade.

 

Nous rejoignons le centre du complexe où nous allons gérer les démarches habituelles. Nous passons de stands en stands pour finaliser notre enregistrement, récupérer carte et puces, chasubles et bonnets, présenter notre matériel obligatoire. Puis nous rejoignons notre bungalow que nous partagerons pour la nuit avec un binôme portugais très sympa.

 

Le soir, briefing. On sent la fierté de Matt et Michael à présenter leur bébé, à célébrer « leurs » champions, les têtes de séries, les plus assidus, les plus jeunes et plus âgés. Se présente également l’un des 4 premiers swimrunners de l’Histoire, qui est le gérant de l’hôtel d’Uto point d’arrivée de la course. On voit ce grand gaillard un peu ours, cool mais en même temps ému, nous souhaiter du courage et bonne chance, nous parler de son île, Uto, the island of love, et nous promettre une immense accolade à l’arrivée.

 

Puis vient la question de la météo. Elle n’est pas fameuse aujourd’hui. Elle sera bien pire demain. Du froid, de la pluie, du vent donc beaucoup de courants. Pour autant, pas question d’annuler ou de changer la course. Le « deal » est que si l’on s’y lance, c’est que l’on s’estime capable d’y arriver.

 

En revanche, en déroulant le parcours, ils nous annoncent que pour passer Pig Swim, la portion de natation qui sera la plus exposée, il est nécessaire de raccourcir un des cuts off de 45’. Douche froide. Je sens Guy bouillir à côté de moi. 45’ ce n’est pas anodin. Il va falloir ne pas mollir dès le début pour être sûr de passer. Pour autant, je comprends l’idée. Avec les barrières actuelles et les conditions de demain il ne sera pas possible de passer Pig Swim, ou, si l’on y arrivait, de finir la course dans les temps, c’est-à-dire avant la nuit. Rédhibitoire ! Il faut donc être sûr que ceux qui vont passer ce cut raccourci seront capables d’aller au bout. Ou plutôt, que pour finir la course, il faut pouvoir passer ce cut avant 11h15. Sinon, le temps ne se rattrapera pas et les cuts suivants seront infranchissables. Ça met pas mal la pression.

 

Durant le repas, nous rencontrons quelques binômes français. Avec certains le contact passe très bien. Nous échangeons pas mal avec le team sang pour sang sport dont l’un des membres, Julien Valette, est l’un des organisateurs du swimrun de Vassivière. Ce sont deux jeunes passionnés et passionnants. Ils ont un sacré niveau mais ont pourtant beaucoup d’humilité et de disponibilité. Nous rencontrons également les organisateurs du swimrun Riviera. Voilà des pistes intéressantes pour les compétitions à venir.

 

Après le repas, nous préparons nos affaires pour le lendemain. Pour nous, aucun doute à avoir, nous partirons en long. Je ne remercierai jamais assez Alexandre de m’avoir prêté sa combi. Par prudence nous rajoutons une cagoule néoprène, ainsi qu’un top thermique, juste au cas où … Puis au dodo, la nuit va être courte.

 

Au petit matin, lorsque nous nous levons et allons chercher notre petit déjeuner à l’hôtel, il pleut, il y a un (très) fort vent, il fait froid. Décidemment, cette saison, j’ai la guigne question météo.

 

Le petit déjeuner avalé, nous nous préparons et allons poser les sacs dans le ferry qui va les amener à Uto, the island of love, notre point d’arrivée … si tout se passe bien. Puis nous prenons place derrière la ligne de départ, entourés de chasubles rouges (équipe masculine), oranges (équipes féminines) et vertes (équipes mixtes). Le décompte est annoncé, on se congratule et s’encourage. Une fusée de détresse détonne et s’élève dans le ciel de Sandhamn. Ça y est Ötillö 2017 est lancé.

 

Les fauves sont lâchés. Ça file à toute allure devant nous. Guy, comme à son habitude, part doucement alors que je voudrais filer comme une balle. La première portion à pied nous fait traverser le petit port, serpenter entre les quelques maisons du hameau, avant de traverser notre première forêt du jour, qui nous permet d’accéder à la première plage.

 

J’ai un souvenir des conditions terribles lorsque nous nous mettons à l’eau. L’aube apparaît à peine, les nuages sont très bas, il pleut ou du moins il bruine très fort. La mer est formée, c’est le moins que l’on puisse dire, et les embruns se mêlent à la pluie. Rajoutez les bateaux, le public matinal, les concurrents qui crient pour se retrouver, pour se préparer à la transition, l’eau froide dans laquelle nous entrons, j’ai l’impression fugace d’un maelström, d’être sur Omaha Beach.

 

Au loin, nous apercevons une île sur laquelle brille une lumière clignotante, notre point de sortie. Nous nous jetons à l’eau dans une belle pagaille, avant d’être très vite ballottés par les vagues. De part et d’autre des nageurs, des bateaux nous encadrent, luttant contre les éléments eux aussi. Bien vite les vagues nous empêchent de situer la lumière, trop basse pour être vue dans les vagues. Heureusement, j’ai anticipé le courant et suis parti bien 20° à bâbord de la lumière. Pour autant, nous ne sortirons de cette première portion de natation, la plus longue, qu’à l’endroit exact du repère, signe qu’effectivement ça pousse très fort.

 

Durant plusieurs portions, nous alternons course (ou plutôt marche) sur la grève et à travers les arbustes du bord des îles et natations courtes mais houleuses. Les entrées et surtout les sorties d’eau sont épiques. Ça glisse, les vagues nous drossent sur les rochers, le courant nous fait dériver.

 

Nous retrouvons les conditions du Rockman. Du granit pentu, recouvert d’algues, de mousse, d’herbe, de terre, le tout bien mouillé. Et quand nous quittons la roche, c’est pour nous retrouver sur des racines glissantes et piégeuses et sur de la terre dont les flaques cachent des trous sournois où nous nous enfonçons parfois jusqu’au genou (véridique !). Je double parfois, mais je suis obligé ensuite d’attendre Guy qui ne semble pas à l’aise sur ce type de terrain.

 

Une longue portion de 8,8 kms nous permet de trouver une piste bien plus carrossable. Pour autant notre moyenne ne décolle guère et je ronge mon frein à chaque équipe qui nous double. Nous ne sommes pas dans un bon jour.

 

Guy prône la prudence, la gestion. Je sens bien qu’il n’est pas à l’aise, encore moins que moi, et que sa douleur l’empêche d’aller à son rythme habituel, d’avoir cette réserve qui lui permet d’en garder sous le pied pour la fin.

 

Nous passons le premier cut sans encombre, avec une heure d’avance mais nous savons que le prochain sera plus chaud. Les portions suivantes ne sont pas très roulantes et notre moyenne s’en ressent.

 

Lors d’une petite portion sur une île, alors que nous allons nous mettre à l’eau, notre chemin croise celui d’un binôme mixte. Et là, surprise. C’est Emmanuelle, la petite pin-up que j’avais rencontrée un mois plus tôt au Norseman. Elle était qualifiée pour Ötillö mais ne pensait pas pouvoir venir. Finalement elle est là ! Nous nous sautons dans les bras, discutons quelques instants avant de plonger et qu’elle nous largue sans ménagement.

 

À un moment le constat est clair. Si nous continuons à ce rythme nous ne passerons pas. Je bouge Guy. Il est hors de question de nous planter maintenant par peur de ne pas finir plus tard. Il faut y aller, sans chercher à gérer. Il faut courir dès et autant que l’on peut. Rien à calculer. C’est dommage car nous allons fournir un effort à un moment où le terrain ne s’y prête pas, où nous sommes obligés de prendre des risques alors que nous aurions dû accélérer lorsque c’était plus facile et plus efficace. Mais il n’y a pas d’alternative et donc nous y allons.

 

L’approche vers le ravitaillement-cut off se fait dans le stress et la douleur, sur une longue piste. Nous courrons non-stop, nous ne relâchons pas l’effort. Vient la délivrance. Nous franchissons l’obstacle à 11h00, un petit quart d’heure seulement avant le couperet ! Le ravitaillement lui-même est lugubre. Il pleut, le vent est fort, il fait très froid. Les boissons chaudes sont trop chaudes et les froides ne tentent guère.

 

Nous repartons donc avec un gros stress en moins, mais en sachant que nous avançons dorénavant vers un des plus gros obstacles, la fameuse Pig Swim. Chaque natation, en particulier les plus grosses, pose le même problème des vagues et du courant. Nous avons une bonne flottaison avec nos combis longues et notre pull buoys, surdimensionné dans mon cas. En revanche, nous faisons le choix de nager sans plaquettes, ce qui nous protège les épaules mais nous fait perdre en rendement instantané. Du coup nous subissons un maximum les vagues et le courant, tels des bouchons, sans avoir les moyens de lutter correctement.

 

Nager devient une épreuve très difficile. Je suis parfois complètement désorienté, d’autant que la visibilité est faible et que les repères lumineux qui indiquent le point de sortie sont fixés trop bas pour que nous puissions les voir correctement depuis les vagues. Je n’ai pas peur. C’est impressionnant mais je sais que nous sommes en sécurité. Les bateaux sont là à chaque fois, bien placés pour nous récupérer si le besoin s’en faisait sentir. Par contre, je ne prends pas de plaisir à nager aujourd’hui. Je subis.

 

À cela il faut bien entendu rajouter le courant violent contre lequel il faut lutter constamment, les sorties de l’eau parfois très périlleuses et le froid qui nous transit pendant les 100 premiers mètres au moins, avant que le corps ne s’y habitue.

 

Pig Swim arrive enfin. Un gros kilomètre, guère plus, mais dans la zone où vagues et courant sont les plus forts. Nous nous mettons (jetons) à l’eau en même temps qu’un binôme qui semble être d’Europe de l’est. Je pense prendre le bon cap, en visant un amer plus de 300m à gauche de la sortie prévue.

 

Pour autant, très vite, ce sont les éléments qui nous dirigent. Nous faisons bouchon dans les vagues. Les embruns mêlés à la pluie qui baissent la visibilité, les lunettes qui s’y mettent et prennent l’eau, il me faut à plusieurs reprises me redresser pour retrouver mes repères. Guy prend le relai alors que mes bras sont en train de lâcher. La sortie arrive, bien lentement à mon goût mais finalement elle arrive. Ça y est ! Nous sortons de l’eau. Pig Swim est passée !

 

La prochaine grosse étape est la portion de près de 20 kms à pied. Nous sommes inquiets car le temps file et notre avance aux cuts n’est pas énorme. C’est difficile de ne pas avoir forcément les ressources pour pouvoir accélérer et de ne pas être serein sur notre capacité à respecter les horaires. Nous décidons que sur cette longue portion, nous allons chercher à faire l’effort pour maintenir une moyenne élevée (à notre petit niveau du jour) pour nous mettre à l’abri d’une élimination. Cela sera d’autant plus possible que les prochaines portions de natation vont être bien plus courtes. Il ne restera, en effet, qu’un gros kilomètre à faire en plusieurs portions après ce « semi ».

 

Juste avant, nous arrivons à un cut off où nous retrouvons Emmanuelle. Son binôme, la mort dans l’âme, déclare forfait pour cause d’hypothermie. C’est hélas la dure loi du sport. Je suis vraiment désolé pour eux, pour elle…

 

Nous les abandonnons à leur triste sort en plongeant pour rejoindre l’île suivante. Ça y est, nous sommes sur le semi et nous voulons aller vite. Pour autant, entre ce que nous prévoyons et la réalité il y a parfois un monde. Le chemin que nous empruntons est loin d’être terrible et il est difficile d’y courir. La moyenne s’en ressent à nouveau. Puis il rejoint une piste carrossable et nous commençons à pouvoir « accélérer ». Nous sommes seuls. Personne en vue devant et surtout, nous le sentons, plus grand monde derrière !

 

 Nous avançons à environ 8 km/h. Ce n’est pas que nous soyons si fatigués, juste qu’il nous est impossible aujourd’hui d’aller plus vite. Nous rejoignons une route lorsque la pluie se met à tomber.

 

Il fait très froid, la pluie s’intensifie. Guy, qui a fait le choix d’enlever la combi sur cette longue portion, la remet sur le ravito intermédiaire, pour se maintenir au chaud. Nous repartons sous une pluie maintenant battante. Après plusieurs kms nous quittons la route pour une piste carrossable. Lorsque la piste se transforme à nouveau en sentier technique, nous savons que l’eau n’est plus très loin. Nous passons le tout dernier cut avec seulement 30’ d’avance. C’est peu. Et c’est d’autant plus difficile de se dire que nous sommes derniers ou presque. À ce moment-là, la consolation d’être toujours en course est faible.

 

La mise à l’eau est difficile. Après plus de 3h au « sec » le contact avec la mer à 10-11° est très dur. Je grelotte. 260m de natation et nous escaladons une petite île que nous allons traverser de part en part. Devant nous un, puis deux binômes.

 

Il ne nous reste alors « que » 800m de natation en 4 portions et 6,5 à pied en 5 portions. Nous savons désormais que nous irons au bout quoi qu’il arrive. Je propose à Guy d’accélérer et de chercher à doubler ces équipes. Nous nous mettons à l’eau en même temps qu’eux et les passons dans l’eau.

 

Plus loin, alors que les éléments se déchaînent, nous trouvons un ravitaillement tenu par des Suédois encore plus transits de froid que nous. C’est dire ! Ils nous encouragent mais je dois bien dire qu’à ce moment-là je n’échangerai pas ma place avec la leur. Puis nous rattrapons encore deux autres binômes avant la dernière natation.

 

Je l’avais bien repérée cette natation, sur les reportages des années précédentes, en particulier sur celui d’Intérieur Sport. Une portion très courte où il faut sauter dans l’eau du haut d’un rocher d’environ 1,5m de haut, avec un gars qui nous encourage à l’autre bout. Lorsque nous y arrivons c’est de la joie, du soulagement, de la fierté. On va le finir cet Ötillö !

 

À la sortie nous reprenons un binôme et je propose à Guy de garder la longe pour que je puisse le tirer. J’ai les jambes et je veux accélérer autant que possible. La portion finale fait 3,5 kms, une paille, et je veux lâcher les chevaux en vue de l’écurie.

 

Guy accepte et nous menons un train plus rapide, dont un dernier binôme fera les frais. Le suivant est trop loin. Tant pis. La ligne approche peu à peu sans que nous mollissions. L’hôtel se dessine au loin. Les drapeaux Ötillö claquent au vent. La nuit tombe. Une dernière montée que nous savourons en marchant puis c’est l’arche tant attendue, où nous attendent Matt et Michael. Un dernier effort, nous levons les bras et ça y est, nous sommes finishers de la finale du championnat du monde de Swimrun !

 

Une bière (délicieuse) en compagnie d’Emmanuelle qui me félicite mais que je sens forcement déçue, un en-cas, une douche, un bon repas puis un bon dodo nous attendent maintenant !

 

Nous finissons 112èmes (sur 119 finishers et 148 partants) en 13h10’48. Le bilan est très mitigé. Nous ne pouvons être contents de ce temps et de ce classement. Les blessures, la fatigue ne peuvent être des excuses. Nous n’avons pas été bons sur cette course. C’est un peu la douche froide après notre bon classement et notre bonne prestation sur le Swimrun Côte Vermeille. Cela nous laisse un goût amer, un goût d’inachevé. Nous avons participé à une course mythique mais notre résultat ne donne pas du tout envie de nous en féliciter. On a l’impression d’avoir raté le rendez-vous, d’avoir gâché la fête. Oui, certes on l’a fait, on l’a fini mais bon, sans avoir pu en profiter, sans avoir pu nous prouver ce qu’on valait, intrinsèquement.

 

Ce sera à nous maintenant de nous interroger et de chercher à progresser. Nous avons, malgré tout au fond de nous, la satisfaction d’avoir pu participer à cet évènement unique et de l’avoir terminé. Et ça, ça n’a pas de prix.

 

Pour nous, la suite des aventures des Renards du Désert s’annonce bien plus sereine. En ayant pu participer à Ötillö, nous n’avons plus besoin de courir après les courses qualificatives ou les points du Swimrun Ranking.

 

À nous les courses pour le plaisir, selon nos envies, sans pression. Dans l’idée, il y aurait un petit tour en Ecosse (Loch gu Loch, pour aller voir Nessy), la Costa Brava, pour conjurer le sort de ne pas y être allé cette année.

 

Puis également rendre visite aux copains du Rockman à Cannes et à ceux d’Ötillö à Vassivière et sur la Riviera. Sans parler du Rockman Pyrénées qui devrait poindre son nez d’ici un an. Bref, suite au prochain épisode. Car nouvel épisode il y aura, parole de Renard !

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