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trail

  • Interview des Sardines

    Cet été, avant le Norseman, les Sardines m'ont contacté pour une interview. De l'eau a coulé sous les ponts mais voici le texte de cet article.

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  • Ma Saintélyon

     

    Au début il a eu la diagonale, en 2011. Première expérience de l’ultra. Ca fait mal, c’est dur, j’en sors avec une tendinite mais quel pied, quelle aventure. Dans ma tête se met en place un « triptyque », une sainte trinité de l’ultra-trail : diagonale, templiers, UTMB.

    La diagonale me donnant 4 points UTMB, il ne m’en faut à l’époque qu’un seul autre pour accéder au tirage au sort. La seule course qui me permet en cette fin de saison 2011 de l’obtenir est la Saintélyon. Mais ma tendinite, mon planning de travail et le gros coup de pompe réunionnais m’incitent à ne pas trop vouloir en faire. La Sainté ce sera pour plus tard, l’UTMB aussi.

    Vient 2012 et ma participation à l’endurance trail des Templiers. 109 kms de boue sur les Causses de Millau. 19h15 de course dont 19h de pluie. Un plaisir… Mais j’ai rempli la deuxième étape du contrat et surtout j’ai les 3 points qui, cumulés aux 4 de la diagonale, me permettent de participer au tirage au sort 2012 de l’UTMB. Je ne suis pas tiré au sort. Rideau.

    En 2013, rebelote. Je perds les 4 points de la diagonale valables 2 ans seulement, mais je garde les 3 points de Templiers. Il m’en faut donc à nouveau 4 pour participer au tirage au sort (à ce niveau-là j’espère que vous suivez encore, il faut vraiment avoir la tête en plus des jambes pour participer à ces courses à la c…). Je pars en chasse d’une course à 4 points. Ce sera le Grand Raid du Queyras fin juin. 128 kms dans un endroit que je connais comme ma poche, c’est la course pour moi. Hélas les conditions météos désastreuses de ce printemps jouent contre nous et la course est annulée, reportée sur le demi-format de 58 kms. Je le boucle et empoche deux points.

    Restent deux points à trouver. Ça pourrait être à nouveau les Templiers mais bof, j’ai déjà fait. Les Hospitaliers sinon mais le temps que je me bouge c’est complet. Reste la Sainté. Aller c’est parti. Je flippe un peu car si je me loupe, plus de solution de repli. C’est la der des ders, la dernière course de 2013. Un échec, une annulation et je perds 2 ans de points UTMB, le coef 2 pour le tirage au sort. Bref celle-là j’irai au bout et encore plus s’il le faut !!!

     

    Bon tout ce préambule pour lancer le compte rendu de cette course.

    La Sainté 2013 c’est 75 kms de nuit entre Saint Etienne et Lyon, par les monts du Lyonnais. C’est 56 % de route, le reste de chemins, de pistes. C’est du verglas, de la neige, de la boue. C’est 14000 personnes sur l’ensemble des courses, 8000 pour le seul 75 kms auxquels s’ajoutent les relais. C’est donc la cohue d’un Marseille Cassis sur les sentiers des calanques, de nuit dans la neige, le tout éclairés aux frontales. C’est enfin 1800m de D+ et 2100m de D-, Lyon étant plus basse que Saint Etienne.

    Ma Saintélyon c’est surtout une course en compagnie d’Elodie. Toute auréolée de sa diagonale elle court elle aussi après l’UTMB. Il lui manquait 2 points, ce sera la Sainté cette année encore. Et comme on doit juste arriver au bout on se dit que ce serait sympa de la vivre le plus longtemps ensemble.

    Elodie et la Sainté c’est déjà de l’histoire ancienne. Du pur Warriorette. L’année dernière elle était encore à Paris samedi après-midi, à sauter au dernier moment dans le train pour Lyon, se nourrissant d’un mauvais repas SNCF, calant une bouteille d’eau dans le soutif et finissant sa première Sainté. Autant dire que cette année c’était, sur le papier, plus que du velours pour elle...

    La Sainté 2013 c’est la 60è édition d’une course mythique et populaire. L’organisation est donc bien rodée. On récupère nos dossards en quelques minutes au palais de sports de Lyon Gerland. De là une navette nous amène à St Etienne, de porte à porte. Le pied ! Un grand hangar, style hall de foire nous accueille. Des gradins, une zone calme, des transats mis à disposition, du chauffage, tout est fait pour nous permettre d’attendre minuit, l’heure du départ sinon du crime.

    Une pasta party bien décevante plus tard, on se pose et se repose sur nos transats, sans vraiment trouver le sommeil. On voit à coté de nous les vieux briscards bien organisés, avec matelas gonflables et duvets, casques sur les oreilles et caches sur les yeux.

    23h30, on se prépare, on se change. Camel back sur le dos, bonnet sur la tête, gants sur les mimines, on se rend sur le site départ. J’ai eu beau en faire pas mal de ces départs je ne sais pas pourquoi l’émotion m’a pris sur celui-là. L’éclairage des frontales, la minute de silence pour ce champion décédé dans l’année, y’a quelque chose…

    Puis au son de light my way de U2 c’est le départ. 7 kms de route pour sortir de la ville et enfin rejoindre nos chers sentiers. 7 kms d’un long ruban de lumière, d’un flot ininterrompu de coureurs. Le thermomètre d’une pharmacie affiche -5°. Ambiance…

    Puis ça y est, on monte, la route se rétrécie, le verglas commence à apparaître et au sommet de la côte la neige, les champs. Ah enfin !

    Un bouchon. Vu comme ça glisse certains chaussent leurs chaines à neige. On hésite puis on les met nous aussi. Et là, le pied, c’est le cas de le dire. On va trouver tout au long de la course 2 types de coureurs : ceux qui ont ces chaines et qui courent quasi normalement, et ceux qui marchent et se ramassent à côté (au bas mot une douzaine sur la course). Le gain est indéniable. Nous avons opté pour le système Turtles. Deux triangles de chaines sous la semelle reliées par une sangle en silicone qui les maintient sur la chaussure. Ca s’enfile et s’enlève en quelques secondes, ça tient, et seul le métal est en contact avec le sol, du coup c’est solide et ça ne s’use pas, contrairement à d’autres modèles.

    Bref nous voilà sur nos sentiers. Difficile alors de vous faire un « vrai » compte rendu de la course. Il fait nuit, on passe notre temps à slalomer entre les coureurs et les marcheurs. Ça monte, ça descend. On passe par de la boue, de la neige, du verglas. Au milieu de nulle part (mais alors vraiment nulle part) on trouve soudain quelques zigs qui nous encouragent à grand renforts de cloches et autres sifflets, un petit braséro à côté. On franchit de villages endormis et d’autres plus que réveillés. C’est fou. On bouchonne, on court, on marche dans les montées. On passe de la moiteur de la forêt au petit vent très frais des crêtes.

    Elodie est une locomotive. Là où j’enlève et je remets ma veste, mes gants, où je réajuste mes Turtles, elle continue telle un métronome. Impressionnante la miss. A chaque mini arrêt elle continue et je fais l’effort pour la rejoindre. Bizarrement je me sens plus à l’aise en descente, et j’arrive (un peu) à la distancer et à rattraper quelques concurrents. Et tout aussi bizarrement, alors que d’habitude je me débrouille mieux en montée, là je rame et je force pour la suivre.

    Les kilomètres se suivent, pas assez vite à notre goût. Les ravitos aussi, bien que nous ne nous y arrêtions que très peu, tellement il est difficile de repartir dans le froid. On va passer la nuit comme ça, à courir beaucoup, à marcher un peu, à discuter et à s’encourager.

    Au bout de 55kms je commence à bâcher. L’aube arrive mais Lyon est encore loin. Je force pour tenir jusqu’au ravito. Je suis récompensé par la beauté du soleil qui se lève au loin, pile de derrière le Mont Blanc. Magique ! Fabuleux !

    Passé l’avant-dernier ravito, je repars avec Elodie mais dans la douleur. J’ai trop forcé et je commence à le payer. Je tiens au mental mais bientôt, la mort dans l’âme, je dois me résoudre à laisser partir ma locomotive. Elle a encore le feu, moi je m’éteins peu à peu. Vers le 60è ça se confirme : les jambes tétanisent. Impossible de courir. Lorsque je m’y essaie les crampes arrivent au bout de 100m. Donc je marche. 15 kms. Le temps d’en voir passer des concurrents. Des minces, des gros, des très gros, des jeunes, des vieux, des vieilles. Comme dirait Claude, des « qui marchent plus vers la tombe que vers l’arrivée », mais qui marchent néanmoins. Et plus vite que moi. Les boules.

    Au 65è, alors que je passe le panneau, une ampoule que je me traine depuis plusieurs heures déjà se crève d’un coup sous le pied droit. Ils vont être longs ces 10 derniers kms…

    J’arrive sur Lyon en marchant, descendant des volées de marches arc-bouté sur les rambardes. Après mon expérience difficile sur le Lyon Urban Trail en avril 2012 où j’avais abandonné sur un gros coup de fatigue, je me dis que Lyon et moi c’est définitivement pas fait pour coller.

    Les kms s’égrènent lentement. Je prends mon mal en patience en marchant à mon rythme. Puis c’est le Rhône, puis Gerland, puis l’arrivée. 11h43’35. Plus du double du temps du 1er. 1h06 après Elodie, impériale.

    On se retrouve dans le palais des sports, à se dire que non plus jamais ça, elle est trop dure celle-là. Et c’est vrai qu’elle est très dure. Je ne sais pas pourquoi on a tous cette impression. Est-ce le froid ? L’alternance route-sentiers qui permet de courir plus que d’habitude ? La nuit ? Mais qu’est-ce que j’en aurai bavé ! Sans doute aussi que de partir pour « juste » avoir des points qualificatifs au bout ne met pas dans l’ambiance habituelle. On sentait ces coureurs pour qui la Sainté était le graal, le défi ultime. Pour nous elle n’était qu’un passage, une étape vers l’UTMB et pour moi une bonne prépa pour le Marathon des Sables. Et au bout du compte je m’y suis cassé les dents.

    Du coup même si je n’aime pas refaire des courses déjà faites, je pense que j’ai un contentieux avec celle-là et qu’un jour ou l’autre je m’y collerai avec comme objectif de mieux la finir. De la vaincre plutôt que de la subir.

     

     

    Nico.

     

    PS : quelques réflexions.

    1/ Lorsque j’ai raconté mon « aventure » saintélyonnaise, j’expliquai que j’avais 60 kms dans les pattes et que j’en avais 75 à faire, d’où mes 15 kms de marche, sans pouvoir courir. « Tu veux dire que tu es capable de courir 60 kms non-stop, 18 de plus qu’un marathon ??? » « Ben oui, ça va c’est que 60 kms… »

    2/ Ca me fait penser à José qui va voir son médecin du sport et qui lui dit « docteur, je viens vous voir parce que, en compétition, quand je cours plus de 90 kms, j’ai une tendinite qui m’arrive… » Et le docteur, placide, « Ok, on va voir ça… »

    3/ A ma sœur qui me dit « je ne comprends pas pourquoi tu cours 75 kms de nuit en décembre entre St Etienne et Lyon, ça me dépasse », « ben pour en faire 175 autour du Mont Blanc. » Quelle question !

    4/ Quand Elodie explique ce qu’elle s’apprête à faire cette nuit-là, certains lui répondent que la voiture ça existe. « Et là rideau, je coupe toute discussion, on est trop éloignés, pas sur la même planète, c’est pas la peine… »